Photo: J. Trifault
Photo: J. Trifault

 

  • La première opération sérieuse de sauvetage remonte à 1979 : lorsque le troupeau de Sauveur Marty, à Saint Hippolyte, réputé le dernier « vrai » cheptel rouge du Roussillon, faillit être envoyé à l’abattoir. C’est l’insistance énergique d’une communauté de néo-ruraux venus d’Allemagne qui va permettre son rachat in extremis, puis, après quelques péripéties, l’installation des 170 brebis, 70 agneaux et 4 béliers (ouf !) au hameau de Fauruc, près de Quillan, dans l’Aude (Steger & coll, 1994).

 

Les éleveurs de Fauruc vont globalement conserver le troupeau en race pure ; mais leur vision historique globale est celle d’une race rouge « originelle » remontant à l’antiquité, puis dispersée à travers la Méditerranée, et possédant aussi des rameaux continentaux, tels la solognote, ou la rouge de Coburg en Allemagne. Leurs publications nous semblent opérer une totale confusion entre les anciennes populations qu’ils baptisent « rouge du Roussillon » ; et les mérinos de type électoral ou negretti par exemple, voire le mérinos d’Arles : ainsi, l’iconographie de référence est pour eux le tableau du « tondeur » de Van Gogh … (Steger, idem).

 

Il y aura d’ailleurs à Fauruc des introductions, limitées semble-t-il, de béliers mourérous et solognot. Puis la communauté se disperse, et le troupeau également.

 

Une poignée d’individus 12 brebis et 2 béliers est déjà partie en Allemagne, et sera gérée en consanguinité stricte au sein de …12 micro-familles (de 1 à 3 brebis …), sous l’égide du zoo de Nüremberg.

 

Un autre lot de 12 animaux est racheté par Dominique Massoubre, et part en Gironde dans la ferme conservatoire de Leyssart. Là, une partie est gérée en consanguinité, et une autre est injectée dans un troupeau important d’origine limousine et landaise conduit en plein air, où les accouplements ne sont pas forcément gérés (agneaux sous puis sur la mère).

 

Enfin, un petit noyau reste à Fauruc où, malgré quelques accouplements de hasard en estive, on trouvera une trentaine de brebis correspondant au phénotype en 1993.

 

Cette « souche Marty » est considérée encore actuellement par certains experts comme la seule méritant l’appellation de rouge du Roussillon authentique.

 

  • Ce sauvetage ayant fait quelque bruit, les organismes d’élevage tentent de redéfinir le standard de la race (Arvieu et Pujol, 1981), et de dresser l’inventaire des troupeaux susceptibles d’en détenir une proportion appréciable. Une première (et dernière) réunion en décembre 1980, au buffet de la gare de Narbonne, dégage le bilan suivant : 2 éleveurs pour 150 brebis dans les P.O. ; 700 brebis (incluant les 180 de Fauruc) chez 9 éleveurs pour l’Aude ; 300 brebis pour l’Hérault, détenues par quatre anciens andorrans fixés sur Pardailhan. La moyenne d’âge des bergers est, paraît-il, déjà élevée. Cette réunion n’aura pas de suite concrète.

 

 

Douze ans plus tard, deux initiatives nouvelles apparaissent :

 

  • La première, due au conseil général des P.O., vise à recréer un troupeau rouge « témoin » sur le département. L’élevage retenu est celui de Max Billiès, à St Laurent de la Salanque. Pour accélérer le processus, une vingtaine de brebis et deux béliers mourérous sont achetés dans les Alpes Maritimes et incorporées à la quarantaine de brebis rouges déjà présentes ; mais M Billiès s’en séparera semble-t-il assez rapidement, se disant déçu par leur valeur laitière. Puis il vend une partie du troupeau suite à des problèmes familiaux, et prend ensuite sa retraite. Son successeur, Laurent Amiel, remontera un troupeau d’environ 200 têtes, à forte dominante rouge, avant de tout liquider en 2007. Ce troupeau, seul cas dans l’Association, a sorti le gène VRQ (origine Mourérous ?) et présenté au moins un cas de tremblante.

 

  • La seconde démarche émane du Parc Naturel Régional des Grands Causses, alors au stade de préfiguration, et sollicité par des éleveurs aveyronnais : car le souvenir de la « barbarine » est encore vivace dans le sud du département. Au titre de la biodiversité et du patrimoine, il est décidé de travailler sur trois races locales menacées, Caussenarde des garrigues, Raïole et rouge du Roussillon, en utilisant notamment la technicité aveyronnaise pour faire de la cryoconservation à titre de sauvegarde.

 

  • Le Parc finance donc un premier inventaire en 93, puis, de 1994 à 2001, un véritable programme de conservation (17 béliers rouges seront prélevés par Ovi-Test pour cryoconservation entre 95 et 99 ; 1 600 doses, représentant 11 d’entre eux, sont stockées en cryobanque nationale) et de relance, par aide à l’achat de brebis et l’élevage d’agnelles (6 éleveurs sont aidés sur son territoire). C’est également lui qui finance l’animation technique sur cette période, qui publie les rapports d’activité annuels et une plaquette d’information « grand public ».

 

  • Une association, fédérant également les éleveurs de caussenardes des garrigues et de raïoles, est créée en 1994. Elle est reconnue par le ministère, et adhère à France Upra Sélection en 1999. Autonome jusqu’en 2007, elle rejoint début 2008 le nouvel Organisme de Sélection « Upra Lacaune » dans le cadre de la refonte du dispositif génétique français.

 

  • D’autres organismes sont impliqués localement dans ce programme de relance : Languedoc Roussillon Elevage assure l’encadrement administratif, financier, et gère le programme « tremblante » de 1994 à 2007 ; les chambres d’agriculture du Gard, de l’Hérault et des P.O. participent aux tournées d’inscription et au repérage des jeunes mâles ; le Parc Naturel Régional du Haut Languedoc a appuyé la démarche de deux éleveurs sur son territoire ; la région Languedoc Roussillon apporte un complément au fonctionnement du centre de béliers.

 

  • Sur le plan national, France Upra Sélection et l’Institut de l’Elevage valident les programmes, et interviennent ponctuellement dans les débats de terrain …

 

  • Enfin, une association départementale d’éleveurs de rouges du Roussillon se crée en 2005 sur les Pyrénées Orientales. Elle relaie l'Upra sur le terrain, aide à la création de nouveaux troupeaux et organise des animations lors des manifestations agricoles.